Numéro de requête 2004/AR/1188

Date
Instance
REC BE
Marque
Garden Trend
Numéro de dépôt
Déposant
TOOMAXX HANDELSGESELLSCHAFT MhH
Texte

EN CAUSE DE :

TOOMAXX HANDELS GESELLSCHAFT MhH, société de droit autrichien dont le siège social est établi à 3403 Klosterneuburg (Autriche), Aufeldstrasse, 17-23,

Requérante,

Représentée par Maître Benoît Van Asbroek, avocat à 1200 Bruxelles, rue Neerveld, 101-103,

Plaideurs : Maîtres B. Van Asbroeck et L. Masson,

CONTRE :

BUREAU BENELUX DES MARQUES, dont le siège est établi à 2591 XR La Haye (Pays-Bas), Bordewijklaan, 15,

Défendeur,

Représenté par Maître Ludovic De Gryse, avocat à la Cour de cassation et Maître Brigitte Dauwe, avocat, dont le cabinet est établi à 1060 Bruxelles, rue Henri Wafelaerts, 47-51,

Plaideur : Maître B. Dauwe.

                                                                                           *****


I. DECISION ATTAQUEE

Le recours est dirigé contre la décision du Bureau Benelux des marques (en abrégé « BBM »), actuellement l’Office Benelux de la Propriété Intellectuelle, en abrégé « l’Office »), du 10 mars 2004 refusant l’enregistrement de la marque <<Garden Trend>> pour les produits de la classe 20.


II. PROCEDURE DEVANT LA COUR


Le recours est formé par requête, déposée par Toomaxx au greffe de la cour, le 10 mai 2004.

L’affaire a été fixée sur la base d’une ordonnance du 10 juin 2004 en application de l’article 747§2 du Code judiciaire.

La procédure est contradictoire.

Il est fait application de l’article 24 de la loi du 15 juin 1935 sur l’emploi des langues en matière judiciaire.


III. FAITS ET ANTECEDENTS DE LA PROCEDURE


1. Le 14 août 2002, Toomaxx a procédé à l’enregistrement international de la marque semi-figurative « Garden Trend », sous le n° 792437, pour désigner des produits de la classe 20, à savoir : meubles, glaces (miroirs), cadres ; produits compris dans cette classe, en bois, liège, roseau, jonc, rosier, corne, os, ivoire, baleine, écaille, ambre, nacre, écume de mer, succédanés de toutes ces matières ou en matières plastiques.

Cet enregistrement international, basé sur un dépôt autrichien n° 2764/2002 du 25 avril 2002, désigne notamment le Benelux comme pays auquel la protection réclamée s’étend.

2. Par courrier du 26 mars 2003, le BBM a informé l’Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle (OMPI) du refus provisoire d’enregistrement de la marque « Garden Trend » au motif que :

Le signe « Garden Trend », composé exclusivement de deux noms communs Garden (Anglais pour : jardin) et Trend (anglais pour ; style), est dépourvu de tout caractère distinctif pour les produits mentionnés en classe 20 pour autant qu’ils aient trait à un style jardinier (voir article 6 bis, par. 1er, sous a. de la Loi Uniforme Benelux sur les marques en annexe).


Par courrier du 26 septembre 2003, le mandataire de Toomaxx a contesté la position prise par le BBM. Les arguments avancés à l’appui de cette contestation sont les suivants :


- le signe « Garden Trend » dispose d’un pouvoir suffisamment distinctif pour remplir sa fonction de marque ;
- le signe est une marque figurative ;
- la politique du BBM est d’accepter les marques figuratives ; dans l’intérêt de la sécurité juridique, le BBM ne peut s’éloigner de cette ligne de conduite.

Par un courrier du 18 décembre 2003, le BBM a motivé plus amplement le maintien de son refus d’enregistrement comme suit :

- conformément à la jurisprudence de la Cour de Justice des Communautés européennes (arrêt du 23 octobre 2003, C-191/01, DOUBLEMINT) le BBM doit refuser d’enregistrer un signe si celui-ci désigne, en au moins une de ses significations potentielles, une caractéristique des produits ou service concernés ;
- la jurisprudence récente de la Cour de Justice (DOUBLEMINT, BIOMILD (aff. C-104/00)) a écarté le raisonnement de la CJCE dans l’affaire BABY-DRY ;
- le signe « Garden Trend » peut servir à indiquer l’une des caractéristiques éventuelles des produits mentionnés lors du dépôt ;
- la nature de l’examen par le BBM implique que des principes généraux du droit (tels la sécurité juridique) ne peuvent jouer un rôle déterminant ;
- la reproduction graphique choisie pour le signe en question n’est pas exceptionnelle ;
- le signe dans son ensemble ne présente pas de caractère distinctif.

Par lettre du 10 mars 2004, le BBM a notifié au mandataire de Toomaxx le refus définitf d’enregistrement de la marque « Garden Trend » pour des produits de la classe 20.

3. Par son recours introduit contre cette décision, Toomaxx demande à la cour d’ordonner au BBM de procéder à l’enregistrement de la marque « Garden Trend », déposée sous le n° 792437, pour les produits de classe 20.

IV. DISCUSSION

Rappel des principes applicables.

Le cadre légal et les principes applicables.

4. L’article 1er, al. 1er de la LUBM (actuellement l’article 2.1, 1. de la CBPI), dispose que sont considérés comme marques individuelles les dénominations, dessins, empreintes, cachets, lettres, chiffres, formes de produits ou de reconditionnement et tous autres signes servant à distinguer les produits d’une entreprise.

Pour être considéré comme une marque au sens de l’article 1er de la LUBM, un signe doit posséder ou avoir acquis une individualité telle qu’il est propre à distinguer ce produit de produits similaires et à l’identifier à suffisance comme provenant d’une entreprise déterminée (C.J. Benelux, 16 décembre 1991, Burberrys II, n° 17, Jur. 1991, p. 22).

En vertu de l’article 6 bis, 1, a) de la LUBM, inséré par le Protocole du 2 décembre 1992 (approuvé par la loi du 11 mai 1995), l’Office refuse d’enregistrer un dépôt lorsqu’il considère que a) le signe déposé ne constitue pas une marque au sens de l’article 1er, notamment pour défaut de tout caractère distinctif comme prévu à l’article 6 quinquies B, sous 2, de la Convention de Paris ; (…).

Cette disposition de la LUBM doit être interprétée et appliquée à la lumière du texte et de la finalité de la première directive 89/104/CEE du Conseil du 21 décembre 1988, rapprochant les législations des Etats membres de l’Union européenne sur les marques (ci-après « la Directive ») (Cass., 2 décembre 1996, R.C.J.B., 187 (195) ; Cour de Justice Benelux, 16 décembre 1998, aff. DIOR/EVORA, Jur. 1998, 2 (8, n° 15) ; C.J.C.E., 4 novembre 1997, aff. DIOR/EVORA, C-337/95, Rec. 1997, I-6013).

En vertu de l’article 3, paragraphe 1, de la Directive, sont refusés à l’enregistrement ou susceptibles d’être déclarés nuls s’ils sont enregistrés :

a) les signes qui ne peuvent constituer une marque ;
b) les marques qui sont dépourvues de caractère distinctif ;
c) les marques qui sont composées exclusivement de signes ou d’indications pouvant servir, dans le commerce, pour désigner l’espèce, la qualité, la destination, la valeur, la provenance géographique ou l’époque de production du produit ou de la prestation du service, ou d’autres caractéristiques de ceux-ci ;
d) les marques qui sont composées exclusivement de signes ou d’indications devenus usuels dans le langage courant ou dans les habitudes loyales et constantes du commerce.

Il suffit que l’un des motifs absolus de refus s’applique pour que le signe ne puisse être enregistré comme marque.

La Cour de Justice des Communautés européennes a indiqué que chacun des motifs absolus d’enregistrement énumérés à l’article 3, paragraphe 1, de la directive, (et à l’article 7, paragraphe 1, du règlement n° 40/94 sur la marque communautaire qui contient des dispositions identiques), est indépendant des autres et exige un examen séparé (arrêt du 21 octobre 2004 OHMI/ Erpo Möbelwerk GmbH (DAS PRINZIP DER BEQUEMLICHTKEIT), C-64/02 P point 39) ;

De même, l’intérêt général pris en considération lors de l’examen de chacun de ces motifs peut, voire doit, reflléter des considérations différentes, selon le motif de refus en cause (arrêt du 29 avril 2004, Henkel/OHMI, C-456/01 P et C-457/01 P, points 45 et 46 ; arrêt du 16 septembre 2004, SAT.1/OHMI, C-329/02 P, points 25).

L’intérêt général qui sous-tend l’article 3, paragraphe 1, sous b), de la première directive 89/104/CEE se confond avec la fonction essentielle de la marque qui est de garantir au consommateur ou à l’utilisateur final l’identité d’origine du produit ou du service identifié par la marque, en lui permettant de distinguer sans confusion possible ce produit ou ce service de ceux qui ont une autre provenance et cet intérêt général vise la nécessité de ne pas restreindre indûment la disponibilité de signes d’une certaine catégorie pour les autres opérateurs offrant des produits ou des services du type de ceux pour lesquels l’enregistrement est demandé (arrêt du 16 septembre 2004, SAT.1/OHMI), C-329/02 P, points 26 et 27).

L’intérêt général sous-jacent à l’article 3, paragraphe 1, sous c), de la première directive 89/104/CEE et à l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 40/94 qui est identique, vise la nécessité de permettre que des signes ou indications descriptives des caractéristiques de produits ou services pour lesquels l’enregistrement est demandé, puissent être librement utilisés par tous. Cette disposition empêche, dès lors, que de tels signes ou indications soient réservés à une seule entreprise en raison de leur enregistrement en tant que marque (voir, notamment, arrêt DOUBLEMINT du 23 octobre 2003, OHMI/ Wm.Wrigley, C-191/01 P, point 31 ; arrêt du 4 mai 1999, WINDSURFING CHIEMSEE, C-108/97 et C-109/97, point 25 ; arrêt du 8 avril 2003, Linde e.a., C-53/01 à C-55/01, point 73).

5. Dans son arrêt DOUBLEMINT du 23 octobre 2003 (n° 32), la Cour de Justice des Communautés européennes a énoncé ce qui suit :

Pour que l’OHMI oppose un refus d’enregistrement sur le fondement de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 40/94, il n’est pas nécessaire que les signes et indications composant la marque visée à cet article soient effictivement utlisés, au moment de la demande d’enregistrement, à des fins descriptives de produits ou de services tels que ceux pour lesquels la demande est présentée ou des caractéristiques de ces produits ou de ces services. Il suffit, comme l’indique la lettre même de cette dispostion, que ces signes et indications puissent être utilisés à de telles fins. Un signe verbal doit ainsi se voir opposer un refus d’enregistrement, en application de ladite dispositon, si, en au moins une de ses significations potentielles, il désigne une caractéristique des produits ou services concernés. (souligné par la cour).

Ce point de vue de la Cour de Justice a été confirmé dans ses arrêts BIOMILD (C.J., 12 février 2004, C-265/00) et POSTKANTOOR (C.J., 12 février 2004).

Dans ce dernier arrêt, la Cour de Justice a précisé que :

L’article 3, paragraphe 1, sous c), de la directive 89/104 doit être interprété en ce sens qu’une marque constituée d’un mot composé d’éléments dont chacun est descriptif de caractéristiques des produits ou services pour lesquels l’enregistrement est demandé est elle-même descriptive des caractéristiques de ces produits ou services, un sens de ladite disposition, sauf s’il existe un écart perceptible entre le mot et la simple somme des éléments qui le composent, ce qui suppose soit que, en raison du caractère inhabituel de la combinaison par rapport aux dits produits et services, le mot crée une impression suffisamment éloignée de celle produite par la simple réunion des indications apportées par les éléments qui le composent, en sorte qu’il prime la somme desdits éléments, soit que le mot est entré dans le langage courant et y a acquis une signification qui lui est propre, en sorte qu’il est désormais autonome par rapport aux éléments qui le composent. Dans ce dernier cas, il y a alors lieu de vérifier si le mot qui a acquis une signification propre n’est pas lui-même descriptif au sens de la même disposition. (souligné par la cour).

Un écart peut être considéré comme perceptible lorsqu’il affecte des éléments importants de la forme, du signe ou de sa signification. Quant à la forme, cet écart se présentera chaque fois que, en raison du caractère inhabituel ou fantaisiste de la combinaison, le néologisme prime la somme des termes qui le composent. Quant à la signification, l’écart sera perceptible si ce que le signe composé évoque ne coïncide pas exactement avec la somme des indications apportées par les éléments descriptifs. (Conclusions du 31 janvier 2002 de l’avocat général COLOMER, KPN Nederland / BMB (POSTKANTOOR), point n° 70, conclusions du 14 mai 2002 de l’avocat général COLOMER, C-104/00, DKV Deutsche Krankenversicherung/OHMI (COMPANY LINE) n° 51 ; conclusions de l’avocat général JACOBS, 10 avril 2003, OHMI/Wrigley (DOUBLEMENT). (souligné par la cour).

L’écart perceptible doit être plus que minimal. (Conclusions de l’avocat général JACOBS, 10 avril 2003, OHMI/Wrigley (DOUBLEMINT), n° 76).

Si le signe constitué par une combinaison de mots ne présente aucun écart perceptible par rapport aux éléments qui le composent, il doit être refusé à l’enregistrement.

6. Pour apprécier le caractère distinctif d’une marque, il convient de prendre en considération tous les éléments pertinents et notamment les qualités intrinsèques de la marque, y compris le fait qu’elle est ou non dénuée de tout élément descriptif des produits ou services pour lesquels elle a été enregistrée (C.J.C.E., 22 juin 1999, arrêt LLOYD/KLIJSEN, op. cit., point n° 28).

La jurisprudence admet que le défaut de distinctivité ne saurait résulter ni de l’absence d’imagination, ni de l’absence d’un surcroît de fantaisie (arrêts du Tribunal de première Instance du 31 janvier 2001, Taurus-Film/OHMI (Cine Action), T-135/99, Rec.p II-379, point 31 ; Taurus-Films/OHMI (Cine Comedy), T-136/99, Rec., p. II-379, point 31, et du 5 avril 2001, Bank fûr die Arbeit und Wirtschaft/ OHMI (EASYBANK), t-87/00, Rec., p. II-1259, points 39 et 40).

L’appréciation du caractère distinctif ne peut s’effectuer in abstracto mais doit s’effectuer in concreto. Il faut tenir compte de tous les faits et circonstances pertinents et des particularités du cas d’espèce (C.J.B., 26 juin 2000, CAMPINA MELKUNIE /BBM (BIOMILD), Jur., 2000, p. 25, points n° 20 et 39 ; C.J.C.E., 12 février 2004, KPN/BMB, C-363/99, points n° 29-37 ; conclusions de l’avocat général COLOMER, 31 janvier 2002, C-363/99, KPN Nederland/BMB (POSTKANTOOR), points n° 41-42).

7. Les motifs absolus de refus à l’enregistrement d’une marque doivent être appréciés par rapport aux produits ou aux services pour lesquels l’enregistrement est demandé et par rapport à la perception qu’en a le public pertinent, qui est constitué par le consommateur moyen desdits produits ou services, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé.

Application des principes au cas d’espèce.

8. Dans sa décision de refus, le BBM s’est fondé aussi bien sur l’absence de tout caractère distinctif (article 3, al. 1 b) de la directive) que sur le caractère « descriptif » (article 3, al 1, c) de la directive) du signe déposé.

Sur le motif absolu de refus visé par l’article 3, paragraphe 1, sous c) de la directive.

9. Sont refusées à l’enregistrement ou susceptibles d’être déclarées nulles si elles sont enregistrées les marques qui sont composées exclusivement de signes ou d’indications pouvant servir, dans le commerce, pour désigner l’espèce, la qualité, la destination, la valeur, la provenance géographique ou l’époque de production du produit ou de la prestation du service, ou d’autres caractéristiques de ceux-ci (article 3, al. 1 c) de la directive ; article 6 quinquies B, 2 de la Convention de Paris pour la protection de la propriété auquel se réfère l’article 6 bis a) ancien LUBM).

Comme exposé ci-dessus (point 5), un signe doit se voir opposer un refus d’enregistrement si en au moins une de ses significations potentielles, il désigne une caractéristique des produits ou services concernés (arrêt DOUBLEMINT, déjà cité).

10. Selon le BBM, le signe « Garden Trend » est composé exclusivement de signes ou d’indications pouvant servir dans le commerce pour désigner la destination et la qualité des produits pour lesquels l’enregistrement est demandé.

Le caractère distinctif s’apprécie par rapport aux produits pour lesquels le signe a été déposé et par rapport à la perception qu’en a le public concerné, constitué par le consommateur de ces produits ou services.

Les produits pour lesquels l’enregistrement de la marque « Garden Trend » est demandé sont les suivants : meubles, glaces (miroirs), cadres ; produits compris dans cette classe, en bois, liège, roseau, jonc, rosier, corne, os, ivoire, balein, écaille, ambre, nacre, écume de mer, succédanés de toutes ces matières ou en matières plastiques.

En l’espèce le public concerné est composé des consommateurs moyens du Benelux, censés être normalement informés et raisonnablement attentifs et avisés.

11. Le signe « Garden Trend » est composé de deux termes, à savoir « garden » (anglais pour jardin) et « trend » (anglais et néerlandais pour tendance, mode, vogue).

Les langues devant être prises en considératon pour l’appréciaiton du caractère distinctif du signe litigieux sont le néerlandais et l’anglais.

Le néerlandais est une des langues officielles parlées au Benelux.

Même si la langue anglaise n’est pas une langue officielle du Benelux, il faut raisonnablement admettre que le public concerné possède en tout cas des notions suffisantes de cette langue qui le rendent à même de comprendre le mot « garden ». Il ne peut être raisonnablement soutenu que le public concerné (à savoir celui du Benelux et donc non anglophone) n’est pas apte à comprendre le terme « garden » (jardin).

Par ailleurs, tel qu’il a été dit ci-dessus, le terme « trend » est un terme de la langue néerlandaise et signifie « mode, tendance, vogue ».

Associé au terme « garden » ce signe est, pour le public du Benelux, descriptif des produits de la classe 20 pour autant qu’il ait trait à « une tendance relative au jardin ».

L’addition des termes « garden » et « trend » pour les produits de la classe 20 sera compris par le public concerné comme référant à des meubles de jardin en vogue.

12. Dans le cadre de la vérification de la question de savoir si le signe litigieux présente un écart perceptible entre les mots et la simple somme des éléments qui le composent, ce qui suppose qu’en raison du caractère inhabituel de la combinaison par rapport aux dits produits, le mot crée une impression suffisamment éloignée de celle produite par la simple réunion des indications apportées par les éléments qui le composent, en sorte qu’il prime sur la somme desdits éléments (BIOMILD et POSTKANTOOR, déjà cités), il convient de considérer les signes composant la marque dans leur ensemble, le consommateur moyen percevant normalement une marque comme un tout et ne se livrant pas à un examen de ses différents détails (C.J.C.E., 11 novembre 1995, Puma / Sabel, C-251/97, n° 23, Rec. 1997, p. I-6191).

Il a été décidé dans l’arrêt DOUBLEMINT déjà cité qu’il n’est pas nécessaire que les signes et indications composant la marque soient effectivement utlisés, au moment de la demande d’enregistrement, à des fins descriptives de produits ou de services tels que ceux pour lesquels la demande est présentée ou des caractéristiques de ces produits ou de ces services. Il suffit que ces signes et indications puissent être utlisés à de telles fins.

Il convient d’apprécier non seulement si un signe est actuellement descriptif, mais également s’il est raisonnable d’envisager que, dans l’avenir, le signe concerné soit susceptible de désigner des qualités ou des caractéristiques essentielles des produits ou les produits concernés.

13. Contrairement à ce qu’affirme Toomaxx, le fait que le signe serait (comme le prétend Toomaxx) une « invention lexicale », n’est en soi pas de nature à lui conférer un caractère distinctif.

Chaque élément du signe étant descriptif de caractéristiques des produits pour lesquels l’enregistrement est demandé (en l’espèce le terme « garden » est descriptif de la destination des produits – à savoir des meubles de jardin – et le terme « trend » est descriptif de la qualité des produits – à savoir des meubles tendances, en vogue -, il convient de vérifier si la combinaison des mots « Garden Trend » présente un écart perceptible par rapport aux mots qui constituent le signe litigieux.

En l’espèce cette combinaison ne présente aucun écart perceptible par rapport aux mots qui le constituent.

C’est à raison que le BBM fait valoir que le signe « Garden Trend » n’a rien d’inhabituel ou de fantaisiste pour désigner la caractéristique, la destination et la qualité des produits.

La combinaison « Garden Trend » n’ajoute rien à la somme des termes qui la composent étant donné que le signe litigieux signifie que les proudits visés pour lesquels Toomaxx a demandé l’enregistrement, sont destinés aux jardins et sont « tendance », et que le signe « Garden Trend » sera automatiquement associé par le public concerné du Benelux a une telle signification.

Il s’agit d’une phrase composée de termes tout à fait usuels n’ayant rien de distinctif ou d’inhabituel et a fortiori d’original ou de fantaisiste.

La signification du signe « Garden Trend » coïncide avec les termes utlisés pour désigner la caractéristique,, la destination et la qualité des produits pour lesquels Toomaxx a fait une demande d’enregistrement.

Par conséquent, il n’existe aucun écart perceptible dans le signe « Garden Trend » , entre le néologisme et la somme des éléments qui le composent.

Par ailleurs, Toomaxx n’indique pas en quoi le mot créerait une impression suffisamment éloignée de celle produite par la simple réunion des indications apportées par les éléments qui le composent.

14. Contrairement à ce que Toomaxx prétend, les dépôts devant être refusés ne doivent pas être « manifestement inadmissibles » et le signe litigieux ne doit pas être dépourvu de « tout » caractère distinctif (C.J.C.E., arrêt KPN/BBM rendu le 12 février 2004 ; Cour de justice Benelux, 26 juin 2000, aff. A 98/2/14, Campina c. BBM).

15. Aucun argument ne peut être tiré du fait que le signe « Garden Trend » a fait l’objet d’un enregistrement dans d’autres pays.

En effet, il appartient au BBM d’apprécier le dépôt litigieux suivant ses propres mérites et sur la base des règles juridiques applicables dans le Benelux. (voir à ce sujet la jurisprudence de la C.J.C.E. qui estime que le fait qu’une marque ait été enregistrée dans un Etat membre pour certains produits ou services n’a aucune incidence sur l’examen, par l’autorité compétente en matière d’enregistrement des marques d’un autre Etat membre, d’une demande d’enregistrement d’une marque similaire des produits ou services similaires à ceux pour lesquels la première marque a été enregistrée (C.J.C.E., 12 février 2004, arrêt POSTKANTOOR, dispositif, 2).)

16. La marque, telle que déposée, est une marque verbale. le dépôt ne réclame aucun élément figuratif particulier.

En l’espèce, la reproduction graphique choisie pour le signe en question n’a rien d’inhabituel.

En tout état de cause, la reproduction graphique choisie n’est pas de nature à conférer un caractère distinctif au signe litigieux (voir T.P.I.C.E., 3 juillet 2003, T 122/01, BEST BUY). En effet, la police de caractère ou la représentation graphique ne constitue pas en soi un élément permettant à un signe d’acquérir un caractère distinctif (T.P.I.C.E.,aff. T-32/0 du 5 décembre 2000,ELECTRONICA ; T.P.I.C.E., arrêt BEST BUY, op. cit. ; conclusions de l’avocat général G. Cosmas du 4 mai 1999 dans l’affaire C-108/97 de la C.J.C.E. (Chiemsee) ; Cour d’appel de la Haye, aff. R03/371 du 30 octobre 2003, ICT).

17. Le BBM invoque en l’espèce à raison que la monopolisation du signe « Garden Trend » n’est pas justifiée car elle risquerait de constituer une entrave injustifiée pour les concurrents ou des tiers qui voudraient également insister sur la destination et la qualité de leurs produits. Il s’agit d’un argument supplémentaire qui justifie le refus d’enregistrement.

La cour rappelle à ce sujet que l’interdiction des marques descriptives poursuit un but d’intérêt général qui exige que les signes ou indications descriptifs des caractéristiques des produits ou services pour lesquels l’enregistrement est demandé puissent être librement utilisés par tous. Ils ne peuvent donc être réservés à une seule entreprise (C.J.C.E. 4 mai 1999, C-108/97, WINDSURFING CHIEMSEE).

18. Compte tenu de ce qui précède, c’est à juste titre que le BBM a refusé l’enregistrement du signe « Garden Trend » sur la base de l’article 3, paragraphe 1, sous c) de la directive.

Sur le motif absolu de refus visé par l’article 3, paragraphe 1, sous b) de la directive

19. En vertu de l’article 3, paragraphe 1, de la Directive, sont refusés à l’enregistrement ou susceptibles d’être déclarés nuls s’ils sont enregistrés (…) b) les marques qui sont dépourvues de caractère distinctif ;

Une marque verbale qui est descriptive des caractéristiques de produits ou de services au sens de l’article 3, par. 1, c) de la directive, est, de ce fait, nécessairement dépourvue de caractère distinctif au regard de ces mêmes produits ou services au sens de la même disposition sous b) de la directive (C.J.C.E., 12 février 2004, C-363/99, arrêt POSTKANTOOR, n° 86).

20. Le signe « Garden Trend » ayant été refusé à juste titre à l’enregistrement sur la base de l’article 3, paragraphe, 1, sous c) de la directive, c’est à bon droit que le BBM s’est opposé à l’enregistrement du signe « Garden Trend » sur la base de l’article 3, paragraphe 1, sous b) de la directive.

Pour ces motifs, la cour,

Dit le recours recevable mais non fondé ;

Met les dépens à charge de Toomaxx, ces dépens s’élèvent à 186 + 242,94 € en ce qui la concerne et à 242, 94 € en ce qui concerne le BBM.

Ainsi jugé par :

Martine REGOUT, Conseiller ff Président,
Henry MACKELBERT, Conseiller,
Els HERREGODTS, Conseiller,

magistrats de la 9ème chambre de la cour d’appel de Bruxelles, ayant participé au délibéré conformément à l’article 778 du Code judiciaire, qui a été achevé avant le 6 septembre 2007,
et
vu l’empêchement légal de Madame le conseiller Martine Regout d’assister à la prononciation de l’arrêt, prononcé en audience civile publique de la neuvième chambre de la Cour d’Appel de Bruxelles, le 13-09-2007
conformément à l’ordonnance de Monsieur le Premier Président du 13-09-2007
en application de l’article 779 du Code judiciaire,

où étaient présents :

Henry MACKELBERT, Conseiller,
Els HERREGODTS, Conseiller
Yves DEMANCHE, Conseiller,
Patricia DELGUSTE, Greffier.


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